Entretien avec Bobbie Traksel

Dimanche 28 Février 2016

Son nom ne vous dit peut-être sans doute rien. Pour être franc, à moi non plus, jusqu'à ce que je roule avec lui quelques kilomètres l'an dernier, lors de mon défi des Classiques. Retraité des pelotons en 2014, Bobbie Traksel est un ancien coureur cycliste professionnel néerlandais qui compte une quinzaine de victoires en 14 ans de carrière. Mais s'il n'a pas affolé les compteurs, sa victoire acquise dans des conditions dantesques, lors de Kuurne-Bruxelles-Kuurne en 2010, inspire le plus grand des respects et suscite toute mon admiration ! À l'occasion de l'ouverture de la saison des Classiques, ce week-end, Bobbie a très gentiment accepté de revenir sur cette journée infernale du 28 février 2010.

Malgré un parcours prometteur en junior, ta carrière a eu du mal à décoller, jusqu'à ce fameux 28 février 2010...
Avec 14 saisons passées chez les professionnels et quelques belles victoires, je suis très content de la carrière que j'ai eue et des résultats que j'ai obtenus. Mais cette victoire lors Kuurne-Bruxelles-Kuurne fut la plus importante. Tout le monde a vu la course ce jour-là et se souvient des conditions dans lesquelles je suis allé la chercher...

Des conditions apocalyptiques en pleine tempête Xynthia !
Oui, la météo était très mauvaise, mais il faut se dire qu'on a pas le choix.

Et toi, tu portais un cuissard court ?!
Lorsqu'il pleut ou qu'il neige, le cuissard long est rapidement trempé ce qui donne froid. Je préfère rouler en court et appliquer une crème chauffante sur les jambes.

La souffrance est surtout physique ou psychologique dans ces moments là ?
Le cyclisme, c'est un mélange des deux. Si tu n'es pas capable de supporter l'une ou l'autre, tu ne peux pas faire de compétition et encore moins gagner une course.

À quel moment as-tu senti que tu pouvais l'emporter ?
J'étais en bonne forme et je me débrouille bien dans le mauvais temps. Tout était réuni, c'était le bon moment pour moi. À 50 km de l'arrivée, j'ai senti que je pouvais aller chercher la victoire mais il fallait encore que je me concentre sur les autres coureurs...

On se remet bien d'une telle journée ?
Ça n'a pas été facile. Il m'a fallu un peu plus de temps que d'habitude pour récupérer. D'habitude, une journée suffit, mais là, j'ai eu besoin de quatre ou cinq jours de plus.

As-tu gardé le trophée, un âne en peluche, qui rappelle le surnom des habitants de Kuurne ?!
Oui, bien sûr !

Sur les 192 coureurs au départ, 166 ont abandonné et seulement 26 ont réussi à rallier l'arrivée ! Peut-on qualifier ce K-B-K de course la plus difficile de l'histoire ?
Difficile à dire mais en tout cas elle a marqué l'histoire de Kuurne-Bruxelles-Kuurne.

6 commentaires

Christian - Dimanche 28 Février 2016 à 09:44

Super article ! Ces mecs sont de vrais guerriers. Certains devraient regarder ce genre de vidéo pour comprendre ce qu'est vraiment notre sport.

Christian - Dimanche 28 Février 2016 à 09:47

Dans la catégorie "course infernale" tu as aussi le Liège-Bastogne-Liège de 1980, remporté sous la neige par Bernard Hinault.

Aurélien - Dimanche 28 Février 2016 à 09:49

Oh oui ! J'avais vu un reportage dingue sur ce LBL. Des conditions incroyables pour une fin de mois d'avril. J'essayerai d'obtenir une interview de Hinault à l'occasion du prochain LBL pour revenir avec lui sur cette journée monstrueuse :-)

Fabrice - Dimanche 28 Février 2016 à 09:58

Je suis d'accord mais il ne faut pas oublier que les coureurs pro passent moins de temps sur le vélo que nous. Ils roulent plus vite et c'est rare que leurs courses dépassent les 5 heures (même si Hinault avait du batailler près de 7h je crois). Pour partir rouler sous la flotte sur un LBL par exemple, où tu sais que tu vas passer une dizaine d'heures dehors, il faut être costaud dans sa tête...

Christian - Dimanche 28 Février 2016 à 10:01

C'est le genre d'histoire dont on aimerait que les médias parlent plus souvent plutôt que de nous rabâcher les oreilles avec les pseudo-exploits de footeux par exemple. On ne mesure pas, surtout en France, le travail et l'abnégation qu'il faut pour faire ce qu'ils font, c'est dommage.
En tout cas, c'est une super idée que tu as eue d'interviewer Traksel. C'est exactement le sport que j'aime, sans chichi, mais avec courage et détermination. Ca colle parfaitement à ton site, bravo !

Aurélien - Dimanche 28 Février 2016 à 12:41

La France n'est pas une terre de cyclisme, malgré tout le barnum qui est fait autour du Tour de France. Je vais même aller plus loin, la France n'est pas un grand pays de sport. Ce genre d'exploit est très peu médiatisé car ça n'intéresse malheureusement pas les gens ici. La plupart du temps, quand tu racontes que tu te fais une sortie de 5 ou 6 heures en vélo, on te prend pour un fou. C'est triste, mais c'est comme ça...

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